Contexte
Le territoire
de l’Est Lyonnais, composé de 29 communes se caractérise en fin 2011 par une
part de population jeune (-26 ans) au chômage la plus élevée de la région
(35%), et une part conséquente de personnes ayant un bas niveau de
qualification (40%). Une augmentation du chômage de 7% contre 4% en région
est significative, avec une croissance du nombre d’accueils dans les Missions
Locales, faisant remonter une précarité grandissante sur le territoire.
Historique
Ouvert en
novembre 2011, le chantier naval d'insertion MSD Voil'Avenir a depuis ce jour
mis à l'eau son premier catamaran accessible aux personnes à mobilité réduite
construit par des salariés en Contrat Unique d'Insertion. Durant leur
contrat, les salariés ont pu pratiquer les techniques propres à la
menuiserie, la construction en composite, l'électricité basse tension, la
plomberie, la peinture industrielle ... Autant de corps de métiers
nécessaires en construction navale, pour lesquels les professionnels se sont
mobilisés tant sur le plan technique, qu'humain. Cela a permis à la majorité
des salariés de s'orienter vers une formation qualifiante ou un emploi. Le
premier catamaran a été mis à l'eau le 25 mars 2013 à la Grande-motte et sera
mis à disposition de structures accueillant des personnes handicapées.
Besoins repérés
La période de
construction du premier catamaran dit VA32 a été considérée comme une
première expérimentation. En effet, il n'existe pas à ce jour de chantier
naval d'insertion faisant véritablement de la construction navale, qui plus
est, construisant des catamarans accessibles aux personnes à mobilité
réduite. De ce fait, nous nous sommes placés dans une démarche de veille
permanente portant sur les thématiques de l'insertion, du handicap et de la
construction navale. Des besoins ont été confirmés et d'autres sont apparus.
Besoins portant sur l'insertion: - Voil'Avenir se situe au coeur d'une région dominée par la plasturgie et les composites, secteurs en tension - Les salariés ont un besoin d'insertion professionnelle, mais cela ne peut être effectif qu'après avoir retrouvé une estime de soi. Les échanges avec les personnes handicapées et l'objet même du chantier ont confirmé ce besoin essentiel, de par le fait que cette première expérimentation a donné la possibilité aux salariés d'être valorisés au travers de leurs compétences techniques et relationnelles. Besoins concernant le handicap: - Le VA32 sera mis à disposition des structures accueillant des personnes handicapées. De ce fait, ce catamaran remplira son objectif premier. Nous avons constaté avec les clubs et les écoles de voile que les personnes valides désireuses naviguer se trouvent à leur tour en "situation de handicap" lors des navigations du fait de l'aménagement spécifique du pont.
- Les
structures ont émis le besoin d'un catamaran plus petit privilégiant la
navigation en équipage mixte, personnes à mobilité réduite et personnes
valides, dans un objectif de mixité.
Besoins
portant sur la thématique de la construction navale:
- Nous sommes
confrontés à une exigence de finition extrême. Nous devons donc livrer un
catamaran dont les finitions doivent
être similaires à celles d'un chantier naval
« professionnel ».
- Nous avons pu aussi constater que la construction en contreplaqué demande une diversité de gestes à effectuer trop importante pour nos salariés. Ils ont besoin de s'approprier le geste par un temps de pratique plus long et une responsabilité donnée dans l'exécution de la tâche demandée.
Une évolution, en vue d’une adaptation aux nouveaux
enjeux
Afin de
répondre à ces besoins validés lors de la première expérimentation et face
aux besoins nouveaux des utilisateurs (mixité) et des salariés en insertion
(tâches moins variées et plus simples dans l'exécution pour une meilleure
appropriation), nous avons dû remettre en question le fonctionnement même du
chantier. Cela a impliqué une nouvelle ingénierie demandant la mise en place
d'une nouvelle technique de construction appelée "infusion".
Le VA26 sera un catamaran plus petit, tout autant accessible, avec un délai de fabrication plus court et demandant moins de tâches. D'où une exigence de professionnalisation du chantier. Nous nous sommes donc entourés de partenaires professionnels pour l'appui à la construction navale, parmi eux : - VPLPdesign Paris (architecture navale et bureau d'étude) - AdhInotec (mise en place et suivi du process de construction) - Diatex (formation en infusion) - Map-yachting (formation en peinture et gelcoat) - Outremer Yachting (conseil, appui technique et formation en infusion)
Description détaillée des actions
Après avoir
expérimenté la construction d’un catamaran en contreplaqué marine en partant
de pièces découpées numériquement, Voil’Avenir met en place la construction
en polyester utilisant la technique de l’infusion. Cette décision de rentrer
dans une deuxième phase d’expérimentation est due à deux facteurs :
- De par la diversité des techniques liées à l’artisanat utilisées en construction navale, les salariés ont la possibilité d’acquérir une certaine polyvalence dans leurs compétences professionnelles. Aujourd’hui, les chantiers navals utilisent majoritairement la technique de l’infusion, pratiquée dans le secteur de la plasturgie, porteur en termes d'emplois. Par ailleurs, cette nouvelle technique permettra aux salariés d’élargir leur champ de compétences. - La pratique de l’infusion est avant tout une technique de coulage de résine sous vide permettant aux salariés de ne pas être en contact avec les vapeurs de résine. Nous devons nous appuyer sur la technique de la construction à l’envers faite à partir d’un moule, dans un souci de :
-
Travail de
qualité, car toutes les phases peuvent être rectifiées et ajustées avant le
coulage de la résine.
-
Respect d’une période de livraison, tout en sachant
que nous ne pouvons pas prétendre tenir des délais équivalents à ceux d’un
chantier naval professionnel, car la construction est avant tout un « outil »
d’apprentissage.
La mise en
place de l’infusion implique la création d’un livret de production très
précis. Cet outil est adapté aux salariés et évolue en permanence dans le
cadre d’un travail collaboratif. Nous utilisons ce support afin de travailler
sur la langue française et les opérations nécessaires à la compréhension des
plans. En effet, nous avons pu percevoir lors de la première expérimentation
une difficulté de maîtrise de la langue de la part des salariés. De ce fait,
chaque étape de production est décrite en langue française et illustrée.
De juillet à décembre 2013, Voil’Avenira mis en place les outils nécessaires à la mise en œuvre de l’expérimentation : - Finalisation du process et des plans de production adaptés à des salariés en insertion - Finalisation de la première mouture du livret de production - Construction des moules par un prestataire - Essais sur un marbre - Mise en place de partenariats techniques L’année est consacrée à la mise en œuvre de l’expérimentation comprenant :
-
La professionnalisation des salariés
Face au niveau d’exigence de finition nécessaire, nous pourrons bénéficier d’un mécénat compétence en travail de surface et peinture, afin d’initier salariés avec l’aide de professionnels. EN lien avec leur encadrant technique les salariés développeront ces compétences au travers de la pratique régulière. Les salariés, de juillet à décembre 2013 se sont initiés à l’infusion sur des petites surfaces plates disposées sur un marbre. Cette initiation a eu lieu avec l’aide d’un intervenant spécialisé en infusion. Suite à la réception des moules, les salariés ont pu mettre en œuvre l’infusion sur des surfaces courbes de 10m² en étant accompagnés par un formateur comprenant: le cirage du moule la découpe de tissus l’encollage des tissus la mise en place du circuit d’infusion le calcul de la pression nécessaire à la mise sous vide le calcul de la résine nécessaire la technique d’arrachage de tissu le travail de finition
Ainsi, le
formateur a été présent lors des périodes d’infusion des demi-coques.
L’objectif de l’ACI MSD - Voil’Avenir est de dynamiser le parcours de ses
salariés.
Cela passe avant tout par l’implication des salariés afin de susciter l’intérêt et donc l’investissement. Des outils tels que le livret de production sontmis à disposition des salariés, afin de leur donner de l’autonomie dans la saisie de données. Ils sont impliqués dans l’évolution du document et responsabilisés par l’autonomie acquise dans l’exécution d’une tâche.
La
construction du VA 26 impliquant la mise en œuvre de techniques composites
ouvre un champ de coopération avec le secteur de la plasturgie.
Nous
organisons des échanges avec les entreprises du secteur utilisant au travers :
-
de visites d’entreprises
-
d’accueil des
salariés en Evaluation en Milieu de travail (EMT) leur permettant de valider
leur choix professionnel
-
d’accueil des
salariés en formation (non, pré ou qualifiante)
-
de
possibilité pour une entreprise du secteur n’utilisant pas l’infusion, de se
familiariser avec cette technique au sein du chantier
Objectifs :
La conception
et la réalisation d’un catamaran par des non professionnels constituent un
défi technique et social favorisant la création d’un lien entre l’Insertion
par l’Activité Economique et le Handicap.
MSD, via son
action Voil’Avenir, utilise la construction de catamarans accessibles aux
personnes à mobilité réduite permettant aux salariés de s’inscrire dans un
parcours socioprofessionnel.
L’ingénierie a été pensée pour donner la possibilité aux
personnes à mobilité réduite, en fauteuil roulant ou non, d’accéder
facilement sur le bateau, de barrer et de faire les réglages de voiles en
toute autonomie. Ce travail élaboré avec l’aide des utilisateurs, a été
pratiqué en amont du dessin, puis intégré dans un design racé, permettant
ainsi aux navigants d’avoir accès à la vitesse en multicoque en toute
sécurité.
L’ACI
MSD-Voil’Avenir : une réponse innovante
Le VA26, construit par Voil’Avenir, est à la fois
facteur d'innovation sociale mais
aussi d'innovation technique.
Innovation
sociale avec sa double finalité : permettre à
des salariés en rupture de travailler sur leur parcours socioprofessionnel et
à des personnes à mobilité réduite de pratiquer la voile en autonomie.
Innovation
technique avec un cahier des charges qui constitue à lui seul un vrai
défi
-
Développement d’une ingénierie de construction
adaptée à des salariés sans connaissance technique particulière leur
permettant d’acquérir des compétences transférables en lien avec leur projet
professionnel
-
Coût abordable du bateau par les associations et
les clubs de voile accueillant des personnes à mobilité réduite
-
Un catamaran manœuvrable en totale autonomie par
des personnes handicapées en fauteuil : plus besoin de sortir de son
fauteuil pour naviguer, ni d’être assisté pour accéder directement au bateau.
-
Elles peuvent se former à la voile grâce à un
plan de pont spécifique.
- Exigeante
dans sa mise en œuvre, la technique de l’infusion permet aux salariés
d’acquérir un savoir-faire pouvant être transposable dans le secteur de la
plasturgie et des composites, aujourd’hui en tension.
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